EN SAVOIR PLUS
On rajoute des chaises à la Salle du Conseil communal. Une centaine de personnes occupent tous les rangs. De part en part du plafond, une chaîne de petits drapeaux aux prières népalaises, sur fond bleu, rouge, jaune, vert ou blanc emmène l’imagination au Toit du Monde. Face à l’auditoire, le sourire chaleureux de Nicole Niquille. Première femme suisse guide de montagne, aubergiste au Lac Tanay, pionnière d’un hôpital au Népal… L’expérience d’une vie peu banale va défiler, cet après midi 1 er octobre par un choix de diapositives, un film et surtout un récit. A Château-d’Oex, Nicole Niquille se sent près de chez elle, puisque, de son domicile de Charmey elle grimpait aux Gastlosen, ces «Inhospitalières»
voisines du Pays-d’Enhaut.
Pourtant, ses rêves d’enfant étaient de devenir chirurgienne ou trapéziste, mais surtout pas guide de montagne…A dix-neuf ans, une collision en moto détruit les muscles releveurs de sa jambe gauche. Cependant, elle urmonte si bien ses séquelles, qu’elle pourra enseigner : une activité qui lui procurera plaisir à transmettre unavoir, car elle aime étudier.
Mieux encore, elle se lancera dans l’aviation qu’elle abandonnera toutefois au profit de la montagne, car l’envie d’y vivre était plus forte que celle de voler. Elle s’entraîne avec une détermination qui lui vaut de porter vingt kilos sur le dos (pour une stature de 1.60 m. et un poids corporel de 45 kg.), de braver la neige jusqu’aux cuisses, es arêtes vertigineuses, les conditions météos exécrables… Elle réussit son cours de guide en septembre 1986 et voue alors devenir malade du mouvement. La voilà en Jordanie, au Pakistan, au Tibet, au Hoggar. Là bas, en Afrique, on pratique l’escalade et la peinture. Ce seront aussi les grands défis de l’Himalaya, le K2 qu’elle ’atteindra pas, empêchée par un début de phlébite à sa jambe estropiée. Elle est chef d’expédition pour mener es trekkings jusqu’à 6000 m. Mais son cœur croche au Népal.
En parallèle - car l’alpinisme est d’un apport financier insuffisant - elle crée avec des amies la collection de vêtements «Chouette» qui équipera des sportifs – dont des Damounais - durant une bonne décennie. Un dimanche de mai 1994, lors d’une récolte de morilles, un caillou équivalant à une noix tombe d’une centaine de mètres. Il perfore son crâne ; elle perd la parole et reste entièrement paralysée. La réhabilitation à Bâle s’étendra sur vingt-et-un mois. Plus tard, en chaise roulante, elle retrouve ses sommets à Tanay, en Valais. Après avoir suivi avec succès le cours de cafetiers, elle inaugure son auberge «Chez Nicole» le 1er mai 1997. Elle y reçoit des amis, des randonneurs, des handicapés et quantité de gens intéressants. Il y avait tellement de monde que nous étions dépassés… dira-t-elle. Dans la cuisine, son époux est secondé par un Népalais. Aux heures creuses, ce dernier évoque sa sœur Pasang Lhamu, première Népalaise à vaincre le sommet de l’Everest. L’ascension était dédiée à l’amélioration du sort des femmes et des enfants de son pays. Elle y perdit la vie lors de la descente.
Nicole Niquille se prend alors d’enthousiasme pour un partenariat avec la fondation en mémoire de feue Pasang Lhamu. Elle y consacrera son indemnité d’invalidité en créant un hôpital. Fermée l’auberge de Tanay en 2003, Nicole et son mari partent pour Lukla, sur la piste conduisant à l’Everest. A 2850 m d’altitude, un centre hospitalier sera bâti à la force du travail manuel. Les murs érigés en pierres sèches, l’eau captée d’une source dans les rochers, l’électricité d’une microcentrale générée par un système de bisse ; en deux années de labeur par le soleil, la mousson et la neige, la Fondation Nicole Niquille Hôpital Lukla devient un dispensaire à l’entrée décorée de vives peintures locales. Aujourd’hui, une vingtaine d’infirmières et médecins indigènes accueillent avec vingt-cinq lits les accidentés, malades et parturientes. Un bloc opératoire, un équipement ophtalmologique, des traitements dentaires, des vaccinations, l’obstétrique et des conseils de contraception y sont prodigués. Le Népal figure au troisième rang des pays à plus haute mortalité infantile et maternelle. Les familles se composent de six à sept enfants. Les statistiques relèvent un fort taux d’analphabétisme et de désoccupation. Un projet est donc devenu réalité, alimenté par des dons, des fournitures, de la main-d’œuvre bénévoles. Des camps de personnel européen s’y déroulent sur un ou deux mois ; ils favorisent des échanges de méthodes et des ouvertures mutuellement bénéfiques. Dans le futur, il est prévu que l’hôpital sera géré uniquement par les autochtones.
En ce début d’octobre, la conférence de Nicole Niquille suscite une émotion spontanément exprimée par un public venu de toute la vallée. Et l’inlassable engagement de cette battante constitue certainement une garantie de maintien et de développement de sa remarquable entreprise.
Inès Mottier
Publié par le Journal du Pays-d’Enhaut, jeudi 18 octobre 2012
On rajoute des chaises à la Salle du Conseil communal. Une centaine de personnes occupent tous les rangs. De part en part du plafond, une chaîne de petits drapeaux aux prières népalaises, sur fond bleu, rouge, jaune, vert ou blanc emmène l’imagination au Toit du Monde. Face à l’auditoire, le sourire chaleureux de Nicole Niquille. Première femme suisse guide de montagne, aubergiste au Lac Tanay, pionnière d’un hôpital au Népal… L’expérience d’une vie peu banale va défiler, cet après midi 1 er octobre par un choix de diapositives, un film et surtout un récit. A Château-d’Oex, Nicole Niquille se sent près de chez elle, puisque, de son domicile de Charmey elle grimpait aux Gastlosen, ces «Inhospitalières»
voisines du Pays-d’Enhaut.
Pourtant, ses rêves d’enfant étaient de devenir chirurgienne ou trapéziste, mais surtout pas guide de montagne…A dix-neuf ans, une collision en moto détruit les muscles releveurs de sa jambe gauche. Cependant, elle urmonte si bien ses séquelles, qu’elle pourra enseigner : une activité qui lui procurera plaisir à transmettre unavoir, car elle aime étudier.
Mieux encore, elle se lancera dans l’aviation qu’elle abandonnera toutefois au profit de la montagne, car l’envie d’y vivre était plus forte que celle de voler. Elle s’entraîne avec une détermination qui lui vaut de porter vingt kilos sur le dos (pour une stature de 1.60 m. et un poids corporel de 45 kg.), de braver la neige jusqu’aux cuisses, es arêtes vertigineuses, les conditions météos exécrables… Elle réussit son cours de guide en septembre 1986 et voue alors devenir malade du mouvement. La voilà en Jordanie, au Pakistan, au Tibet, au Hoggar. Là bas, en Afrique, on pratique l’escalade et la peinture. Ce seront aussi les grands défis de l’Himalaya, le K2 qu’elle ’atteindra pas, empêchée par un début de phlébite à sa jambe estropiée. Elle est chef d’expédition pour mener es trekkings jusqu’à 6000 m. Mais son cœur croche au Népal.
En parallèle - car l’alpinisme est d’un apport financier insuffisant - elle crée avec des amies la collection de vêtements «Chouette» qui équipera des sportifs – dont des Damounais - durant une bonne décennie. Un dimanche de mai 1994, lors d’une récolte de morilles, un caillou équivalant à une noix tombe d’une centaine de mètres. Il perfore son crâne ; elle perd la parole et reste entièrement paralysée. La réhabilitation à Bâle s’étendra sur vingt-et-un mois. Plus tard, en chaise roulante, elle retrouve ses sommets à Tanay, en Valais. Après avoir suivi avec succès le cours de cafetiers, elle inaugure son auberge «Chez Nicole» le 1er mai 1997. Elle y reçoit des amis, des randonneurs, des handicapés et quantité de gens intéressants. Il y avait tellement de monde que nous étions dépassés… dira-t-elle. Dans la cuisine, son époux est secondé par un Népalais. Aux heures creuses, ce dernier évoque sa sœur Pasang Lhamu, première Népalaise à vaincre le sommet de l’Everest. L’ascension était dédiée à l’amélioration du sort des femmes et des enfants de son pays. Elle y perdit la vie lors de la descente.
Nicole Niquille se prend alors d’enthousiasme pour un partenariat avec la fondation en mémoire de feue Pasang Lhamu. Elle y consacrera son indemnité d’invalidité en créant un hôpital. Fermée l’auberge de Tanay en 2003, Nicole et son mari partent pour Lukla, sur la piste conduisant à l’Everest. A 2850 m d’altitude, un centre hospitalier sera bâti à la force du travail manuel. Les murs érigés en pierres sèches, l’eau captée d’une source dans les rochers, l’électricité d’une microcentrale générée par un système de bisse ; en deux années de labeur par le soleil, la mousson et la neige, la Fondation Nicole Niquille Hôpital Lukla devient un dispensaire à l’entrée décorée de vives peintures locales. Aujourd’hui, une vingtaine d’infirmières et médecins indigènes accueillent avec vingt-cinq lits les accidentés, malades et parturientes. Un bloc opératoire, un équipement ophtalmologique, des traitements dentaires, des vaccinations, l’obstétrique et des conseils de contraception y sont prodigués. Le Népal figure au troisième rang des pays à plus haute mortalité infantile et maternelle. Les familles se composent de six à sept enfants. Les statistiques relèvent un fort taux d’analphabétisme et de désoccupation. Un projet est donc devenu réalité, alimenté par des dons, des fournitures, de la main-d’œuvre bénévoles. Des camps de personnel européen s’y déroulent sur un ou deux mois ; ils favorisent des échanges de méthodes et des ouvertures mutuellement bénéfiques. Dans le futur, il est prévu que l’hôpital sera géré uniquement par les autochtones.
En ce début d’octobre, la conférence de Nicole Niquille suscite une émotion spontanément exprimée par un public venu de toute la vallée. Et l’inlassable engagement de cette battante constitue certainement une garantie de maintien et de développement de sa remarquable entreprise.
Inès Mottier
Publié par le Journal du Pays-d’Enhaut, jeudi 18 octobre 2012